FLOTSAM AND JETSAM a beau être un groupe connu et respecté, il vient de traverser plus de deux décennies métalliques dans une certaine indifférence, sans jamais pouvoir s'imposer comme un cador. Alors que
MEGADETH ou
METALLICA était portés aux nues au début des années 90 avec des albums devenus depuis des références incontournables, les
FLOTSAM AND JETSAM n'ont pas su capitaliser sur des débuts prometteurs avec le médiocre When the storm comes down, et se sont vite retrouvés catalogués espoirs déçus, condamnés à errer dans les limbes des seconds couteaux du thrash metal. Le groupe a jalonné sa discographie d'albums moyens mais aussi de quelques pépites comme
Cuatro,
Drift ou
The cold (voir les chroniques sur le site) qui auraient mérité une bien plus grande considération.
Ugly noise, la dernière livraison du groupe, appartenait plutôt à la première catégorie et avait laissé une impression mitigée. Et ce n'est pas le réenregistrement superflu du culte
No place for disgrace en 2014 qui avait changé la donne.
Le groupe semblait un peu à court d'idées et d'inspiration et avait impérieusement besoin de se renouveller . Le line up en sera le premier à en subir les conséquences avec les arrivées du guitariste Steve Conley (ex F5, side project de Dave Ellefson de
MEGADETH) du bassiste Michael Spencer (déjà présent en 1987 - 1988) et du batteur Jason Bittner (
SHADOWS FALL). En leur qualité d'anciens membres, le chanteur Eric AK et le guitariste Michael Gilbert font office de gardiens du temple. J'avais pu voir à l'œuvre cette mouture inédite en live en Belgique en 2015 (report à consulter sur Metalship) et elle s'était montré extrêmement convaincante et affûtée. L'arrivée de ce nouvel album, sobrement baptisé
Flotsam And Jetsam, était donc l'occasion de confirmer les belles promesses entrevues en concert.
Et les premières mesures ne laissent planer aucun doute. Le quintet de Phoenix affiche une farouche volonté d'en découdre et semble avoir retrouvé toute la fougue de ses jeunes années. Le rythme est élevé, voire trépidant. Le son est à la fois dense et précis, et nous fait profiter au mieux de chaque instrument, notamment d'une basse aussi cinglante que peut l'être celle d'
OVERKILL. Les trois premiers titres éteignent pourtant progressivement l'enthousiasme initial. Ils sont certes bons, mais pas non plus transcendants. Il manque encore un petit quelque chose.
Fort heureusement, le quatrième titre propulse le disque à des hauteurs inespérées (même si espérées !). Le bien nommé "Iron maiden" n'est pas un hommage à proprement parler, mais il y ressemble beaucoup quand même, quoiqu'on en dise. Son riff galopant et son refrain dévastateur en font un hymne de tout premier choix. Et les Américains ne vont pas s'arrêter en si bon chemin. Les excellents morceaux s'enchaînent sans coup férir. "Verges of tragedy" et sa tonalité orientale, et le syncopé "Creeper" nous mettent déjà un genou à terre, avant que "L.O.T.D" ne nous achève en faisant vibrer avec brio la fibre nostalgique de
Doomsday for the deceiver. On saluera à ce propos la performance éclatante d'un Eric AK en forme olympique.
Après l'inévitable petit intermède acoustique si cher aux groupes de thrash, le combo repart avec toujours autant d'énergie sur "Monkey wrench ", "Time to go" et "Smoking gun", trois titres courts, directs et efficaces. Les rusés thrasheurs nous ont gardé le meilleur pour la fin, avec l'excellent "Forbidden territories" et son intro grisante. Une pièce de choix de près de 7 minutes, qui permet de savourer une dernière fois toute la maestria technique déployée sur cet opus, symbolisée par un Jason Bittner très impressionnant derrière ses fûts.
FLOTSAM AND JETSAM a vraiment soigné son retour aux affaires, aussi bien dans le fond que dans la forme (artwork et livret classieux). Cet album éponyme renoue avec des racines thrash metal qui s'étaient quelque peu effilochées au fil du temps et rappelle à tous que c'est souvent dans les vieux pots qu'on fait la meilleure soupe !